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Construction d’un prix aux fruits & légumes

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C’est un rayon emblématique du travail que mène Scarabée avec la production locale. Comment sont construits les prix dans nos rayons fruits et légumes ? Hughes Van Kriekinge, référent, nous explique cette recherche permanente d’équilibre, avec une priorité donnée au local et aux produits de base.

Quelles sont tes priorités et la manière qui en découle de construire les prix, sur le rayon Fruits et légumes ?

Ma priorité est de développer le local. En automne-hiver, 85% de notre approvisionnement en légumes est local ; au printemps, il descend à 40%. En moyenne, nous sommes à 60% sur le reste de l’année.
C’est un bilan très positif. Sur l’ensemble des fruits et légumes, qui inclue des produits comme les bananes et les agrumes qu’on n’aura jamais en local, on est à 36%, ce qui est beaucoup.
Ma priorité, pour proposer les produits locaux au meilleur prix, est de moins marger sur le local, tout en gardant un objectif de résultat net de 28 % sur l’ensemble du rayon. On est donc, en moyenne, à 26-27% de marge nette sur un produit local, soit 31% de marge brute¹. Si on ne travaillait qu’à ce taux de marge, sur l’ensemble du rayon, je serais en-dessous de cet objectif².
L’autre priorité, ce sont les produits de première nécessité, les « basiques » comme les pommes de terre, carottes, oignons, salades ; les tomates et courgettes en été.

Si les produits locaux et basiques sont ceux sur lesquels tu marges le moins, quels sont ceux sur lesquels tu te « rattrapes » ?

Les produits exotiques, produits de niche ou produits « plaisir », achats d’impulsion, comme la mangue, le shiitake ou les pleurotes. Les produits d’import d’Espagne ou d’Italie, comme la tomate, en début et fin de saison ; un produit comme l’orange d’Espagne, aussi, sur lequel notre plate-forme Biocoop est très bien placée. En fait, on peut aller de 38-40% de marge brute sur un produit comme la mangue, pour descendre à 20% de marge brute sur un produit local de première nécessité et de cœur de saison. C’est ce qu’on a fait sur les tomates et courgettes en local l‘été dernier. C’est Scarabée qui absorbe cette baisse de marge, et c’est un choix, stratégique, pour soutenir une économie locale à taille humaine.

Soit nous compensons entre les « familles » de produits, soit nous absorbons une partie de la baisse de marge, l’autre partie étant conservée par les potentielles quantités que nous vendrons en plus… ou pas ! Ponctuellement, on peut ainsi être amené à co-construire une opération avec nos partenaires producteurs. C’était le cas de la « Fête de la pomme », dernièrement. ou lors de « pics » de production sur certains légumes, pour soutenir un producteur afin qu’il ne lui reste pas de la marchandise sur les bras. Le producteur baisse son tarif, Scarabée baisse sa marge et cela se répercute en rayon par une remise de prix plutôt intéressante pour les clients.

Quels conseils donnerais-tu à nos clientes et clients, pour acheter bio « petits prix » ?

De privilégier le cœur de saison tout d’abord. Pour la tomate : attendre début juillet pour la consommer.
Il est vrai que la saison de la tomate commence dans le réseau à partir de mi-avril. Même si elle n’est pas prête en France et encore moins en Bretagne, c’est déjà la pleine saison en Espagne.
Ensuite, le conseil est de privilégier les produits bruts, les basiques : pommes de terre, carottes, oignons, salades ; tomates et courgettes en été.

Existe-t-il des prix engagés, également, sur le rayon fruits et légumes, avec un prix maximum autorisé ?

Oui, on s’engage à proposer 3 produits à « prix maximum autorisé » (PMA) en fruits et légumes. Mais cela concerne les produits achetés sur la plate-forme Biocoop, pas les achats locaux directs.
Nous appliquons donc les « prix maximum autorisés » sur la banane, par exemple, que nous achetons en plateforme, et que nous vendons à un PMA de 1,99 € le kg. C’est un prix intéressant puisqu’il est similaire à ce qu’on peut trouver ailleurs. Rappelons par ailleurs que le réseau commercialise uniquement de la banane bio et équitable.
Toute la complexité, aujourd’hui, est d’arriver à créer un peu d’animation commerciale avec nos approvisionnements locaux pour les mettre en valeur et pour dynamiser nos points de ventes, sans faire de la promotion « agressive ». L’objectif étant de sensibiliser nos clients et de maintenir les volumes prévus chez les producteurs. C’est l’objet de nombreux échanges avec eux, il faut prendre en compte tous les avis, cela prend du temps. C’est aussi ça, une démarche équitable.
Mais si on peut proposer le même produit au même prix en local : c’est ce que je vais privilégier.

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La Fête de la pomme locale, à Biocoop Scarabée Cleunay, en novembre dernier. Avec Lucie, responsable de gestion du rayon fruits et légumes.
Les produits vendus sous « prix engagés » sont-ils vraiment plus accessibles, selon toi ?

Il arrive qu’on soit un peu plus cher en local, comme il arrive qu’on soit un peu moins cher. Cela dépend des produits, des années. La spéculation et le cours des prix jouent un rôle, bien entendu. L’historique des discussions avec nos producteurs nous a poussé à marquer des écarts moins importants entre les évolutions qu’on peut observer sur le marché, d’une année à une autre.

¹ La marge nette est la marge brute dont on soustrait :
la remise adhérent de 5% dont bénéficient 85 % de nos clientes et clients adhérents,
les pertes, évaluées à 2%
² Environ 33% de la marge nette comptable distribution, au global, est dédiée aux achats et charges externes (loyers et coûts de fonctionnement de nos sites). 60% environ servent à payer impôts, taxes, et salaires des équipes. 5,6% sont consacrés aux remboursements d’investissements et au développement. L’objectif de la coopérative est, au final, d’atteindre un résultat net avant impôt de 1,4%. Sur lequel reste à verser des impôts, donc, et, lorsque le résultat est suffisant, primes de participation et d’intéressement aux équipes, ce qui n’a pas été possible depuis 2016. L’adoption du statut SCIC nous engage par ailleurs désormais à remettre 57% de ce résultat en fonds propres ; Scarabée a fait le choix de pousser ce ratio à 100%.

« Ch€re bio ? »

Parlons « prix » : parole de maraîcher

La suite de ce dossier « Ch€re bio ? » dans le prochain numéro de La Feuille de mars-avril 2022 et sur ce site…

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